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Entretien avec Jenny Salgado


L’invitée vedette de Flashmag ce mois est une artiste qui a son art dans la peau, et n’est pas timide de l’exprimer avec des mots. Jenny Salgado Alias, J Kyll, fait partie de ceux-là qui ont marqué l’univers rap canadien francophone depuis les années 90’ égérie du groupe Muzion fondé en 1996, elle aura connu avec ce groupe tout ce dont une rappeuse peut espérer dans sa carrière. Sous contrat avec BMG Canada et Wagram France, elle a connu les plus grandes scènes du monde et collaboré avec les artistes les plus en vue, Kool Sheen, Corneille, Gage, Wyclef Jean, pour ne citer que ceux-là. Artiste aguerrie elle touchera un peu à tous les genres collaborant avec les grandes figures de la musique contemporaine canadienne comme Sylvie Paquette, ou Diane Dufresne, tout en composant des poèmes et musique de film. 2 albums avec Muzion et une flopée d’accolades dont les prix Felix et les urban music awards, J Kyll redevient Jenny Salgado et lance sa carrière solo en 2010 avec l’opus . . . . . "Et tu te suivras " un album très bien accueillis par le public et la critique. Prises entre ses divers engagements sociaux et le travail sur son second opus, Jenny a sacrifié quelques secondes de son temps précieux pour s’entretenir avec nous sur sa carrière, la musique, la place du hip hop dans l’échiquier mondial, sans bien sûr oublier de nous donner son avis sur des questions brûlantes de l’heure.

Flashmag : Jenny Salgado. bonsoir Flashmag et son lectorat sont heureux de vous avoir aujourd’hui comme invitée vedette du mois. Vous êtes la bienvenue le temps de cet entretien notre tribune est la vôtre. Sans tarder nous allons rentrer dans le vif du sujet.

Vous êtes née de parents Haïtiens au Canada. S’il fallait parler un peu de votre enfance au Québec et de votre intégration dans la société canadienne quel sont les moments clefs, qui ont marqué votre enfance quant au choix que vous alliez faire plus tard à savoir la musique?

  • Jenny Salgado : Je suis née de parents Haïtiens au canada cependant je suis restée très liée à mes racines j’ai visité plusieurs fois Haïti et je me suis imprégné de ma culture créole très tôt, et bien sur le fait d’avoir grandi dans une zone défavorisée de Montréal comme le quartier St Michel, a marqué mon enfance et cela quelque part m’a mis sur les chemins des mouvements de revendications

Pourquoi avez-vous choisi de rentrer dans ce domaine qu’est-ce qui vous y a poussé vraiment ?

  • La musique très tôt faisait partie de mon univers, aussi bien lorsque je visitais Haïti, ou à la maison quand j’étais jeune, et ce fut un peu logique pour moi à un certain moment dans ma vie de suivre ce chemin, quand on vient d’un certain background la music elle est en nous forcement, et il faut simplement certaines circonstances afin qu’elle s’exprime en nous, et le choix est souvent le nôtre de la mettre au dehors, afin de partager avec le public.

En 1997 vous fondé le groupe Muzion comment s’est faite la création de ce groupe?

  • Mes frères étaient déjà dans le mouvement Rap alors je les écoutais tous le temps et puis un jour j’ai décidé de prendre part à leur passion et nous avons décidez ensemble de travailler et de mettre sur pieds un groupe, dont l’orientation principale se trouvait dans la tendance rap de l’époque. Venant d’un milieu pas toujours aisé comme je disais plus haut il était important pour nous de faire entendre notre voix, et la musique était le canal le plus à même de remplir cet objectif.

Chemin classique vous signez avec une grosse maison de disque BMG canada à ce niveau-là, que pensiez-vous que vous étiez sur la bonne voie?

  • Bien sûr, que c’était un grand pas, mais nous ne pensions pas trop à ça, mais plutôt à ce que nous devrions montrer au monde.

2 ans plus tard le premier album de Muzion sort, intitulé Mentalité Moune Morne qui vous donne le prix Félix pour L’album hip hop de l’année au Gala de l’ADISQ 2000 et le prix de L’artiste hip hop aux MIMI’s 2000. Ce premier album bien des années plus tard s’il fallait dire ce qu’il représente pour vous que diriez-vous?

  • Les premiers amours sont parfois ceux dont on se souvient le plus, c’est un album référence une introduction de notre manière de faire et de ce que nous comptions faire dans l’arène musicale

En 2002 Muzion sort son second album J’Rêvolutionne qui récolte le prix Félix pour L’album hip hop de l’année au Gala de L’ADISQ 2003 et le prix de L’album francophone de l’année aux Urban Music Awards 2003. Cet album il s’inscrit dans la continuation du premier et confirme votre engagement musical dès le départ, on sent que vous êtes des artistes engagés, étant dans une grosse maison de production n’aviez-vous pas un peu d’appréhension quant- à la sensibilité de certains sur certains sujet

  • Ah très bonne question au départ c’est des situations et des rencontres, et dans ces rencontres il faut déjà savoir si les personnes vont garder leur définition et aspiration propres même quand elles se mettent ensemble, c’est toujours ça les relations. Et c’est aussi cela les relations entre un artiste et sa maison de disque, je pense que lorsque BMG a rencontré Muzion et s’est assis à la table avec Muzion, ils savaient déjà ce qu’on était, et quelle était notre orientation artistique et notre idéologie en somme. C’est vrai, c’est quelque chose que nous faisions avec plaisir, mais la manière et le message que nous portions était quelque chose qu’ils avaient compris que nous ne saurions changer, et que cela n’allait pas être achetable. Nous aussi en s’asseyant avec une multi nationale, on savait quel était leur format et leurs exigences. Nous savions que la multinationale a pour objectif de faire d’énormes profits en vendant le plus grand nombre d’unités possible, mais en même temps la multinationale savait qu’en faisant signer un groupe qui représentait une génération d’individus, et qui en plus portait un message concernant le peuple, elle ne pouvait que capitaliser dessus et je pense aussi que la multinationale ne pouvait pas vraiment prendre le risque de changer notre orientation artistique. Dont il avait été important de savoir jusqu’où on pouvait aller pour vendre le plus grand nombre d’unités et jusqu’où la multinationale allait nous laisser porter la vérité. Je pense que cela c’est fait le plus honnêtement et le plus longtemps possible, et évidemment, au moment où on s’est rendu compte que cela n’était plus possible, les liens se sont dissouts naturellement

Vous collaborerez plus tard avec des artistes tels Wyclef Jean, Sylvie Paquette, Diane Dufresne et Gage, dont le tube Pardonne-moi porte votre estampille s’il fallait dire un mot sur ces collaborations, que diriez-vous laquelle a eu plus d’impact sur votre art et votre personne? Sans faire des jaloux bien sûr?

  • Justement sans avoir à faire des jaloux, eh bien je pense que chaque collaboration artistique apporte quelque chose de spécial, on apprends quelque chose de nouveau, on gagne en expérience, justement je ne collabore pas avec n’importe qui, ce n’est pas toujours par ce que la personne va m’apporter plus d’exposition médiatique ou me permettre de vendre plus, c’est surtout si avec la personne avec qui je vais travailler, tout sera fait pour honorer la qualité du travail aussi bien par respect pour nous même, que pour le public en face de nous. En tout cas toutes les collaborations que j’ai faites m’ont vraiment fait grandir. Sylvie Paquette je crois c’est la première, à m’avoir vraiment demander d’écrire une chanson de bout en bout, me mettre dans la peau d’un personnage autre que moi-même, elle est la première à m’avoir fait confiance sur ce coup-là, et je pense que cela m’a beaucoup apporté ensuite, j’ai eu cette collaboration avec Diane Dufresne qui est une grande dame de la chanson francophone c’est l’une des plus grandes rencontres de ma carrière, c’est quelqu’un qui n’a aucune barrière et qui crée en toute liberté, elle a frappé à ma porte qui a l’époque était qu’une jeune femme noire rappeuse de surcroit, elle m’a demandé de lui insuffler un peu de moi sur des titres de son spectacle sous influences elle m’a rendu un honneur incommensurable. Tout comme d’ailleurs la collaboration avec Mme Michèle Lamont, une grande dame de la culture au Canada qui m’a écrit une lettre que j’ai gardé dans mes tiroirs. Et bien sûr il eut cette collaboration avec le grand Wyclef Jean, qui avec le groupe Fugees sont parmi les tous premiers à avoir mis Haïti sur la carte de la music du monde à avoir levé haut l’étendard de notre pays d’origine. Il a réussi à marier les différents genres de musique, pour en faire quelque chose de génial, de la musique créole, aux sonorités occidentales. Un jour il nous a appelé, demandant de collaborer avec nous ça, j’en revenais pas non plus et j’en reviens même pas encore, et le travail continu on est encore en collaboration et tous ces gens que vous avez cité nous travaillons encore ensemble les liens sont restés solides.

En 2010 vous décidez de lancer votre carrière Solo pourquoi? Une manière de vous réaffirmer?

  • Voilà vous m’ôtez les mots de la bouche sur le titre de l’album je mets 3 point de suspension au début pour marquer tout ce qui a été fait avant, et puis il y a les mots « Et tu te suivras » pour marquer la continuité donc voilà j’avais fait un bon bout de chemin avec Muzion et la dynastie des Mornier, nous avons fait beaucoup de choses ensemble mais je pense qu’à un moment tout le monde doit pouvoir marcher seul, pour voir ce qu’il vaut vraiment, une manière de marquer son identité il faut se regarder dans le miroir avant de pouvoir porter un discours , en tout cas c’était une étape importante pour ma carrière, comme pour tous les autres membres du groupe. Aussi nous avons eu des discussions ensemble c’est toujours le même noyau, nous nous supportons c’est toujours la dynastie des Mornier mais nous avons décidé de nous présenter individuellement

En outre on se rend compte qu’il y aura un certain changement aussi bien sur votre album solo qui est moins rap, et votre patronyme J kyll de Muzion redevient Jenny Salgado pourquoi? Une manière de redécouvrir soi –même?

  • Ah (rires) j’aime la couleur de cet entrevue, décidément… comme je disais plutôt j’avais le besoin d’être moi, arrêtez de me cacher derrière un pseudonyme, derrière un personnage même si le personnage lui-même est une partie de moi. Finalement Jenny Salgado c’est le moi complet, c’est aussi pourquoi je ne me suis pas focalisé, dans l’album sur une simple façade, mais un tout qui explore ma personnalité artistique dans son entièreté. c’est un album artistique qui n’a pas de style en soi, on se promène aussi bien dans le blues, rock, slam, rap, funk, reggae, aussi bien que dans les poèmes parfois assez crus le langage peut être très fort en image parfois.

…ET TU TE SUIVRAS est le titre de votre premier album solo que représente cet opus dans votre carrière?

  • Le titre est assez révélateur… une renaissance si on veut, pour moi la vie c’est des cycles, dans d’autre cycles, ceci est aussi vrai que pour le début ou la fin, Et tu te suivras c’est J kyll qui se représente au monde, elle sort de sa coquille et se dévoile totalement… et je pense que c’est un album référence à partir de …Et tu te suivras les gens savent que je peux aller n’importe où, je n’ai pas de frontière artistique.

Artiste engagée vous faites campagne pour la musique hip hop, ainsi que pour la place des femmes dans le monde, parlant en premier de la musique Hip Hop pensez-vous qu’elle va dans la bonne direction? Si dans les années 90 beaucoup avaient tablé sur le caractère révolutionnaire du mouvement rap mondial des décennies plus tard pensez-vous que le mouvement rap mondial a atteint ses objectifs primaires à savoir une prise de conscience de la populace noire mondiale? Pensez-vous que vous avez fait votre travail comme il le fallait?

  • (rires) ah trop fort … est ce que j’ai fait mon travail est ce que le rap a fait son travail waouh ?! je dirais oui, certains diront non mais je suis un peu nostalgique de ce que le Hip hop était. Le mouvement hip hop est né d’une situation socio-économique qui perdure, à l’époque on parlait de justice sociale, du bas de la pyramide, et des quartiers défavorisé le hip hop est né du désir de dire quelque chose de créer quelque chose. Avec des moyens matériels limités on était capable de faire un beat avec sa bouche ses mains, ou juste de frapper sur une table comme les africains le faisaient quand ils tapaient sur des tam-tams, ou lorsqu’à la fin d’une journée d’esclavage, les esclaves s’asseyait autour du feu et se défoulaient , c’est de là qu’est né le hip hop, aujourd’hui en 2015 on a un peu perdu de l’âme de cet esclave qui cherchait à se défouler, qui cherchait sa liberté on a du mal à la retrouver mais elle existe encore. C’est simplement que le hip hop a pris une place au niveau international, il a gravi certains échelons à présent il est en haut de la pyramide, à présent il veut dire au monde qu’il existe à tous les échelons de la pyramide, il veut revendiquer une existence même au plus haut niveau, c’est vrai avec les Jay-z et Kanye West, et tout l’étalage des bien matériels que l’on voit actuellement, certains pourraient trouver cela péjoratif, mais si l’on regarde plus attentivement c’est une manière de dire que nous aussi, on existe et on veut être respecté à tous les niveaux.

Bien sûr il y’a ceux qui sont exploités, et qui pour quelques bouchés de pains disent n’importe quoi. Il y a ceux qui par ce qu’ils veulent être riches, acceptent n’importe quoi, alors ils se laissent manipuler. Mais cependant ceux qui pensent que le nègre mérite de monter dans les plus hautes sphères de la société, aspirent à cette ascension sociale et se battent pour que cela soit possible cela je le respecte. Est-ce que moi je voudrais le faire? Là est la grande question. Je pense que je suis plutôt du genre de ceux qui pensent à représenter le peuple, et à porter son message, et pas du tout de ceux qui veulent gravir les échelons en affichant la richesse matérielle en faisant une espèce de bling tout en jouant le jeu de ceux qui derrière manient la carotte et le bâton . Est-ce que l’on va revoir le rap reprendre les rênes de la vérité? Probablement, et c’est ce que je souhaite.

Beaucoup se plaignent plus tôt de l’image péjorative que véhicule depuis le mouvement rap avec un mode vestimentaire peu adéquat et l’apologie de la vie de criminelle et de pute, ne pensez-vous pas que quelque part le hip hop a failli la populace noire mondiale, en lui créant encore plus de tort et en lui donnant une image qui n’est pas toujours vrai?

  • Oui forcement, là encore je ne sais pas qui seront vos auditeurs et lecteurs, mais en général on a tendance à pointer du doigt l’individu on a même tendance à pointer un certains mouvement et lui donner tous les torts, et on oublie que ce mouvement fait partie d’une structure qui est beaucoup plus grande et que c’est cette structure-là qu’il faut regarder, est ce que c’est le hip hop lui-même qui a failli ? c’est David et Goliath en fait la structure du système est fait de la sorte que l’on peut légitiment se poser la question de savoir si le hip hop aurait pu faire autrement? Ce qui est partout dans les media aujourd’hui comme hip hop n’a pas été décidé par le hip hop lui-même, mais c’est plutôt une structure systémique qui décide de ce qui doit être diffusé au public. Il y a des gens qui ont beaucoup d’argent qu’ils investissent dans le hip hop et ils décident de ce que le hip hop doit être. Aujourd’hui, ce que le hip hop est, c’est ces gens qui en ont décidé. Alors ils nous disent aujourd’hui en 2015 voilà le genre de musique que le nègre fait, voilà ce qu’il vaut, voilà son genre de femme, c’est comme ça qu’il s’habille, alors il y a un pouvoir dans le système qui a décidé de cela, mais est ce que ce n’est que cela le hip hop? Je ne pense pas, mais c’est simplement par ce que le système a beaucoup à gagner si le nègre porte ce genre de message, que l’on encourage cette façade du hip hop. Comme je le dis souvent c’est la vérité qui est mise en marge aujourd’hui même si la tendance réelle du hip hop existe encore elle peine à se faire entendre.

Le mois de l'histoire des noirs s’était en février selon vous lors d’une interview avec radio Canada, parlant de l’intégration des noirs dans le tissu social canadien et occidental en général vous disiez que cela n’est pas au mieux, il y’a encore çà et là des préjugés qui empêchent une réelle Égalité des chances entre membres des différentes communautés, ne pensez-vous pas qu’avant de vouloir à tout prix intégrer, les autres il faut d’abord se définir soi-même, le problème identitaire de l’afro descendant reste quand même encore assez préoccupant?

  • Très bonne question il y’a un festival culturel ici chaque année, que l’on appelle le Festival FRO (la fondation repose sur les origines), http://fondationfro.com/?lang=en et cette année nous nous sommes demandé s’il fallait d’abord fermer les portes et rester entre nous afin de nous définir nous-même voir se congratuler les uns les autres, au lieu de s’ouvrir aux autres communautés. C’est une question qui perdure et qui est quand même fondamentale. Je pense qu’aujourd’hui en 2015 il est important que lorsque l’on se retrouve entre nous que l’on soit capable de se reconnaitre comme un peuple, au lieu de s’auto fragmenter, mais comme on dit les outils du maitre ne sauraient défaire la maison du maitre, alors lorsque l’on se retrouve dans une communauté d’accueil et que l’on utilise ses outils de communication, il est un peu difficile de dire à cette communauté là qu’elle n’est pas la bienvenue. On est chez elle, on n’a pas le choix. En outre on a des enfants qui naissent ici, et ils devront se faire un chemin dans la société québécoise qu’on le veuille ou pas et ce n’est pas en leur disant de rejeter leur pays d’accueil que l’on aidera à leur donner un meilleur future, mais cependant pour nous les peuple noirs, il est important que l’on apprenne notre histoire, que l’on sache ce que nos parents ont fait en amont pour nous permettre d’être ce que nous somme aujourd’hui, on doit être capable de vivre avec cette dualité, à savoir le désir que nos parent ont eu d’immigrer ici et ce qui s’en est suivi tout en gardant notre âme africaine.

L’un des véritables reproches que l’on fait a la communauté noire de l’occident c’est sa dépendance économique, les entrepreneurs noirs qui sortent du lot ne font pas légion ne pensez-vous pas que du moment où l’on travaille pour les autres, on sera toujours obligé de faire ce qu’ils veulent?

  • Je pense qu’il faut bien définir c’est qui est eux et c’est qui nous? tant qu’on ne pourra pas le définir clairement, tout sera toujours chamboulé. Il faut d’abord se définir en tant que peuple, et s’accepter en tant que peuple tant qu’on est des individualistes on sera toujours au service des autres. Et avant de définir nous-même on devra d’abord être les autres, et même quand je croirai bien travailler pour moi, ce moi-là ne représentera que les autres. On doit se reconstruire un moi, en s’inspirant de notre historique haïtienne, africaine, s’inspirer de ce qu’a vécu le peuple noir dans le monde. Si on regarde la planète on peut bien constater que malgré les divisions des pays, on reste tout de même défini et regroupé les uns les autres par le système économique, et toute cette expansion économique mondiale part de l’Afrique c’est l’Afrique qui a été exploitée pour construire le globe. De toutes les façons il est temps pour les noirs d’offrir quelque chose de spécial au monde il faut penser à offrir ce que personne d’autres ne saurait offrir. Aussi l’homme noir gagnera en respect à cause de son authenticité inimitable. Cependant pour donner à l’homme noir, ce qui lui revient il y a encore beaucoup de chemin à faire en commençant par nous-même.

De descendance africaine quel regard portez-vous sur le continent à l'heure qu’il est, et quelle importance cela revêt pour vous ?

  • D’abord au niveau de l’humanité l’Afrique est le berceau de l’humanité, l’Afrique c’est le début de tout, pour moi ça reste la mère. l’Afrique c’est ma mère, je l’aime beaucoup je la respecte, mais aujourd’hui qu’est qu’il en est? On lui manque de respect on la désacralise, un peu comme cela arrive à presque tout. Les hommes sont entrain de toucher le fond, violant la planète jusque dans ses tréfonds, celle qui en souffre le plus c’est l’Afrique, tout a commencé par l’Afrique, la fin commencera aussi par la fin de l’Afrique, pour moi aujourd’hui l’Afrique comme Haïti d’ailleurs, c’est ce combat entre la survie et la mort il est d’ailleurs intéressant de savoir qui l’emportera? mais je garde bon espoir, malgré tout. Beaucoup de grands penseurs trouvent que c’est à partir de l’Afrique ou d’Haïti que naitra la révolution je ne sais pas mais qui vivra verra mais ce qui est beau c’est que Haïti comme l’Afrique reste debout et ça c’est beau.

Activiste vous avez contribué à diverses manifestations, tout en étant chroniqueuse à radio canada et compositrice de musique de film vous avez d'ailleurs été membre du jury du black film festival en 2012 en quoi ces différentes activités contribuent à votre carrière artiste?

  • Déjà ce sont les causes qui m’appellent, ce n’est pas moi qui les cherchent, et chaque fois que je peux contribuer de ma personne je le fais volontiers, je m’exprime plus à travers la musique, la musique ça me sert à marquer une pause et à réfléchir, à faire resurgir notre humanité que nous oublions de temps en temps, retourner au cœur de la nature humaine. Ensuite il y a l’existence et il y a l’action…il y a des gens qui font des grandes choses rien qu’à travers la musique, mais moi j’ai besoin de temps en temps d’aller sur le terrain. Pas seulement à l’international, au niveau du quartier c’est déjà génial car si vous pouvez changer quelque chose ne serait qu’au niveau de votre rue c’est déjà bien.

La musique noire en général se vend de moins en moins bien et les majors sont de plus en plus capricieuses quant au contrat avec les artistes afro qui de plus en plus sont obligés de s'auto produire comment appréciez cette nouvelle donne problématique? A votre avis comment y remédier?

  • Ah c’est un grand débat ça aussi, là où certains peuvent voir des difficultés, les autres peuvent voir des opportunités. Les maisons de disques sont devenues capricieuses, c’est normal, elles sont en difficultés, l’évolution technologique et les réseaux sociaux actuellement permettent à ceux qui veulent vraiment créer et se faire entendre d’avoir les moyens de le faire, on a plus nécessairement besoins des majors et ça, ça ne les plait pas toujours, et elles deviennent de plus en plus capricieuses. Même au niveau de l’image avec très peu de moyen on peut réaliser un vidéo clip. C’est vrai il y a ceux qui veulent toujours appartenir à la machine et bénéficier probablement de ses facilités, mais ils perdent toujours quelque chose dans la liberté et de l’autre côté il y’a ceux qui essaient de faire les choses par eux même ceux-là aussi à long terme trouvent que c’est avantageux par ce qu’ils ont plus de contrôle sur leur art, et les revenus que cela génère. Et ça c’est bien

La visibilité des artistes Canadiens est mise à mal à cause du pays de sa frontière sud, si les canadiens anglophones ont plus de chance de faire carrière aux USA et de se faire connaitre par le plus grand nombre, on a l’impression que pour les francophones la tache reste très ardue, le Québec semble être bien loin de la France, des Caraïbes ou de l’Afrique ou il y a un marché important pour ces artistes-là, à votre avis que faire pour remédier à ce problème? On a l’impression que L’identité Québécoise et francophone est vraiment mise à mal?

  • Et bien revaloriser l’identité francophone en Amérique du nord est le plus grand débat ici au Canada, c’est la grande question dans l’histoire du Québec, il est doublement difficile pour un artiste francophone de se faire un chemin dans l’univers musical canadien. Quand un artiste comme Drake est poussé promu au plus haut il y a derrière une volonté des gouvernants, à savoir que la structure étatique a décidé de donner à cet artiste ce qu’il fallait afin qu’il y arrive. Il ne l’a pas fait tout seul, il y’a un tapis rouge qui a été déroulé si cela se fait dans le canada anglophone ici au Québec c’est non existant, par ce que le Québec lui-même se cherche encore, il se pose la question de savoir s’il doit se détacher du canada ou continuer à vivre dans la fédération avec encore plus d’autonomie, ou alors oublier cette histoire d’autonomie et se dire qu’il est canadien mais francophone.

Sans vous interrompre je dirais qu’ être artiste québécois au Canada ce n’est pas facile, mais en plus être un artiste noir vivant au Québec c’est encore plus compliqué. Et bien sûr ma sympathie au Québec qui semble minuscule et esseulé dans une mer de pays d’expression Espagnole et Anglaise.

  • Et voilà compliqué de partout être québécois au Canada c’est compliqué et être artiste noir de Québec au Canada alors la ouf!

Vous êtes en train de travailler sur votre second album solo peut-on avoir quelques info de premier ordre sur son contenu et à quoi il va ressembler? Quand est ce que l’on peut l’espérer sur le marché?

Vous êtes un peu plus soft et intello de nos jours ce n’est plus la J kyll des années 90 en tous cas?

  • Oui ce n’est plus J Kyll des années 90’ elle a engrangé de l’expérience. J’ai fait le tour du cycle, comme je disais au début de l’entretien on revient à une étape où partout dans le globe, il y a des mouvements de revendication, et on voit aussi certains groupes de musique vouloir faire des choses différemment, j’ai envie de suivre ce mouvement le timing est parfait pour revenir à ça, c’est évident qu’il y a un côté intello qui va rester mais bien sûr un coté free, va aussi y être. dans le prochain opus je voudrais que l’on ressente la voix du peuple, la voix de la rue, l’âme de la rue, l’âme de la base. Je pense que ceux qui ont suivi l’évolution sauront à quel point on est rendu. J Kyll et Jenny Salgado vont devoir cohabiter peut être même se faire duel

Quand est ce que l’on peut espérer cet album ?

  • Je travaille dessus, l’ambiance est bonne l’âme est là je regarde à présent le coté de son impact sur le peuple, je le sortirais lorsque le moment sera propice en principe ce sera courant 2016

Au moment de clore cet entretien avez-vous un mot spécial envers le public?

  • Ah premièrement je suis très contente d’avoir fait votre connaissance maintenant je vous connais à jamais, Merci à ceux qui nous lisent et nous écoutent car personne n’y est obligé merci pour tout, et surtout continuez à nous écouter, et à partager, sans désir de juger mais en voulant comprendre sincèrement, essayons de comprendre, essayons de nous connaitre avant de nous juger, c’est ce que je souhaite pour les années qui viennent… je souhaite que l’on revienne au fondement du real love

Jenny Salgado Flashmag et son lectorat vous disent merci pour cet entretien cordial et ouvert.

  • Tous le plaisir était pour moi ce fut l’une des plus belles entrevues que j’ai jamais eu, les questions étaient assez pertinentes, merci encore.

Interview réalisée par Hubert Marlin Elingui Jr.

Journaliste Écrivain


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